Ce soir, je regarde à nouveau ce film (prenez la peine de le voir, c’est une belle bouffée d’oxygène, en version originale mais très intéressant), et je repense aux différentes étapes de ma vie jusqu’à aujourd’hui.
Je me suis toujours demandé pourquoi les enfants n’étaient pas tout à fait libres de faire leurs propres choix. Nous, parents avons toujours envie de voir nos rêves se réaliser et pas les leurs…
Quand je repense à mes années collèges, je revois encore mon père, criant au désespoir parce que je rêvais d’entrer dans une école d’art comme ma soeur. Elle a choisi l’option théatre à partir de la quatrième, mon père n’a pas digéré son choix d’orientation d’autant plus qu’il avait englouti toutes ses économies pour la scolariser pendant trois ans au Lycée Mermoz d’Abidjan, l’école des nanties de l’époque, 4 ivoiriens seulement sur un effectif en majorité français.
Et voilà qu’elle a voulu faire du théatre. Le coup de massu!
Il s’est résigné parce que selon lui elle était moins brillante. Pour moi il était hors de question de changer avec le bac. Même la directrice de mon école était contre moi. ma demande a été refusée sans commentaires. Le théatre c’était pour les moins bons. Mon père me disait, « le théatre, tout le monde fait du théatre, la pleureuse du village fait du théatre, puisqu’elle pleure sur commande, le cultivateur fait du théatre, lorsqu’il fait son show dans son champ au milieu de ses légumes…Quelle idée de créer une école pour le théatre! »
J’étais malheureuse; J’admirais ma soeur, je l’enviais, j’aimais lui donner la réplique pour travailler Le bourgeois gentilhomme, Le médecin malgré lui, Le mariage de figaro, Antigone….
Grâce à elle d’ailleurs j’ai eu une très bonne note en français en première parce que j’avais déjà lu toutes ces oeuvres avant même d’avoir le niveau requis pour les étudier.
Ma soeur était bonne à faire du théatre et moi à faire de « grandes études ». Mais vous savez tous comme on aime s’affirmer, je me suis dit que si je ne pouvais pas faire du théatre, je fairais la couture.
Là c’est ma mère qui est montée au créneau.
« La couture, quelle couture? Moi je fais la couture, je ne suis pas allée à l’école pour faire la couture. Je te regarde et je sais ce qui te va et je dévine ta taille de vêtement (et elle n’avait pas tort); elle faisait la coupe à plat, rien qu’en regardant sa tante, puis sa cousine faire, elle n’a vécu qu’avec la couture, sans formation…). Crois tu que je t’ai scolarisée pour faire de la couture? N’importe qui fait de la couture. Tu t’achètes une machine à coudre, une table, tout le matériel nécessaire et tu t’installes à un coin de rue ou au marché et tu es couturière. Pff, la couture, tout ce que je te demande, c’est d’ouvrir grand les yeux sur tes livres et tes cahiers et de ramener de bonnes notes à la maison. » Voilà qui était dit.
Je passe les détails, on pourrait faire de mon histoire un roman. Avant même d’arriver au collège, je lisais Le père Goriot, Le Silence de la mer, Quatre vingt treize, Tartuffe et que sais je encore! Tout ce que pouvait contenir la bibliothèque de mon père.
Mais moi ce qui m’intéressait c’était l’aventure, les métiers artistiques…
J’ai été très vite saturées. J’ai commencé par n’ennuyer en classe, puis à bouder mon travail, parfois par pur vengeance…
Bref. Je n’ai pas eu le bonheur de faire ce que je voulais. Mes parents rêvaient pour moi. Et aujourd’hui je me surprends moi même à répéter le même scénario. Mes enfants ont douze ans, et je les rêve ingénieurs, médecins, astrologues….. J’ai un peu peur de les pousser dans la mauvaise direction, de les étouffer avec mes propres aspirations…
J’espère que cela n’arrivera pas et que je serais assez raisonable pour les laisser libres de leurs choix.
Si vous êtes papa ou maman, que rêvez vous pour vos enfants? Êtes vous ce papa asiatique qui rêve son fils avec un Phd alors qu’il n’a que 6 ans?