Coeur Meurtri sans terre!

Je ne dirais pas pays car demain je ne sais qui dirigera mon pays natal.  La force Licorne, les Etats unis, l’ Ecomog, un prisonnier sorti de la MACA, ou tous ces soldats débarqués en nombre en Côte d’Ivoire.

Mes terres ne m’appartiennent plus désormais. Pourquoi?

Après le massacre des populations en 2004 certains paysans ont bravé la terreur pour reprendre le chemin de leurs plantations :

 – femmes surprises et violées dans les champs,

– jeunes gens tombés dans des guets à pens et égorgés dans la forêt,

– confrontations sanglantes entre paysans propriétaires terriens et expropriateurs

Nous n’avons jamais vu les bons samaritains, qui oeuvrent pour le bien être des paysans, de la population.

Où étaient ils lorsque les miens à l’ouest, fuyaient les tueries en 2002? Où étaient t-ils lorsqu’ils ont dû fuir encore cette fois leurs maisons et leurs terres?

Où étaient ils lorsque des sympathisants de leur candidat pointaient du doigt le Guéré. (le groupe ethnique dont je fais partie), lorsqu’ils ont écrasé, brûlé, tué?

Ils ne pouvaient rien voir, occupés à combattre eux mêmes.

Le pire, c’est que même au sein des communautés, pour une poignée de francs CFA, certains sont prêts à vendre père et mère. Pas étonnant si l’on sait que les banques, la poste, et tous moyens officiels de transaction ont été fermés sur l’ordre de la gentille communauté internationale. Tout ça c’est pour le bien du peuple.

Qu’est devenue ma mère patrie?

Sommes nous en présence de la volonté d’un peuple lorsque :

 la force licorne prend l’aéroport d’abidjan,

lorsque la force licorne  roule au devant des rebelles démocratiques.

Lorsque pendant des manifestations « pacifiques », on est surpris de voir un lance rocket sur l’épaule d’un manifestant?

Ces questionnements n’ont plus aucun intérêt aujourd’hui. Je ne fais qu’un bref récapitulatif de la situation.

Aujourd’hui l’exode est terminé.

Réunis à moitié à Abidjan la capitale, une partie de la famille a décidé de rester là.

 » ils m’ont dit: « nous en avons assez de fuir. s’il faut mourir, nous préférons mourir là où nous sommes. On ne peut pas mourir de plusieurs façons. A la machette ou à tir de canon, un mort est mort »

Celle qui a fui avec quelques enfants au sud ouest (San pedro) est réfugiée depuis hier dans une église. elle m’a dit :

 » nous nous sommes réfugiés à l’église, le pire c’est que les rebelles ne contrôlent plus tous ces gens à qui ils ont fait des promesses, tous ces jeunes armés; ce sont eux qui n’arrêtent pas de traquer les guérés »

Et dans la confusion, mon demi frère et mon cousin se sont échappés de l’église pour essayer de passer au Libéria par la mer. Ils croient être plus à l’abri dans les bois qu’à l’église. Nous attendons que le jour se lève là bas pour savoir s’ils ont réussi.

Je suis un coeur meurtri sans terre car même si j’y retourne demain, je vais marcher en regardant par dessus mon épaule, je ne dormirai que sur une oreille et je n’aurai plus jamais aucun plaisir d’être dans un pays que je ne reconnais plus.

Dieu merci, je parle anglais et français, et j’avais commencé à apprendre le chinois. Demain, lorsque je rencontrerai Hilary CLinton dans les couloirs d’un ministère, je pourrais converser avec elle. Et si c’était  Barak Obama, je ne serais pas intimidée non plus, nous parlerons la même langue.

Le français? C’est ma deuxième langue maternelle. Je suis dans un pays démocratique où un pouvoir est renversé par un autre à coup de  blocus, de privation de la population, de combat déloyal.

Vive le monde occidentalisé qui a toujours voulu nous apprendre la civilisation.

J’ai perdu tout espoir de vivre comme une ivoirienne. Ce matin encore nous attondons la fin avec soulagement et désespoir mêlés. Que Gbagbo tombe et que le coup d’état démocratique vive.

Nous sommes en côte d’ivoire mais nous rivalisons en nombre avec des chars, des hélicoptères, des coupes coupes, désormais nous marcherons au pas pour le bonheur de nos maîtres.

Bonne journée à vous!

Nous les Nuls!

Je n’ai pas écrit mes pensées depuis quelques jours parce, en dehors de Gbagbo, Alassane Ouattara, l’ONU, l’ONUCI, la CEDEAO et les messagers des Rois, je vis, je prépare un mariage: un mois en tout et pour tout. J-2 c’est aujourd’hui.

La robe est trouvée, la décoration réfléchie et décidée, le repas commandé, le Dj trouvé, bref, des préparatifs marathons et doublement stressants, vue la situation de la Côte d’Ivoire. J’ai perdu le sommeil. Déjà que je ne dormais que 5 heures par nuit, l’organisation du mariage (à petit budget) n’a pas arrangé les choses.

Nous y sommes presque. Samedi 15 la pression va s’aménuser.

Je me réjouis d’avance. Et je promets de partager les images avec vous.

Ce soir, ce que je voulais partager en plus avec vous, c’est pourquoi je suis « nulle » et beaucoup d’autres gens ordinaires comme moi, tous « nuls ».

Je ne dis rien ce soir, je savoure les vérités au bout d’une autre plume.

http://presse.ivorian.net/article/?p=21996

Avant de vous quitter ce soir, je termine avec cette petite anecdote d’un pauvre citoyen qui reçoit la visite d’une bande de malfrats.

Réveillé par les coups frappés à sa porte, un père de famille ouvre et se retrouve nez à nez avec des braqueurs:

« bonsoir mon ami, nous venons enlever tout ce qu’il y a d’intéressant chez vous.

« Ah oui? Si vous avez besoin d’un coup de main, je suis votre homme ».

Et Monsieur, de charger canapé, télévision, congélateur, tableau… tous ses biens dans la fourgonnette des braqueurs. Au moment où ces derniers font tourner le moteur pour déguerpir, le père de famille hèle le chauffeur:

« Attendez, attendez mes amis, ne partez pas, vous avez oublié la lampe torche, et le père noël de mon fils »

Complétement désarçonné, l’un des braqueurs en perd presque son nouchi (le nouchi c’est le jargon ivoirien du voyous).

« Mais il n’est pas bien ce monsieur! Il est bête ou quoi ».

« Non je veux me rendre utile c’est tout, vous rendre la vie belle »

Si la situation du pays ne s’améliore pas, nous finirons tous chercheurs de charniers quand il ya des charniers ignorés en 2002 et 2004 et que personne n’avait entendu parler de TPI, de l’ONU. Comme je vous l’avais annoncé en décembre, je suis comme un cabri mort, je n’ai plus peur du couteau.

A l’heure où je vous écris ces mots, les combats ont débuté à Duékoué, l’ouest de la côte d’ivoire, le farwest de mon pays, cet endroit où n’importe quel individu tenant une arme arrive et fait sa loi (nous appellons de temps à autre la famille pour vérifier qu’ils sont sains et saufs, pour le moment).

Cette région où il y a déjà eu des milliers de morts sans avocats. Cette région ne fait pas la une. Mais je dis que mêmes NULS, ils sont aussi des êtres humains, qui ont besoin de la « protection » de la Communauté internationale, de l’ONUCI ou que sais je encore. S’il faut trouver des charniers, il y en avait à Duékoué, à Toulépleu, à Danané, à Guiglo. Trouvez les et jugés les responsables.

Bon la NULLE a assez parlé!

Marine Le pen a dit…

Pas de décisions hatives, pas de prise de position radicale avant d’avoir jugé de façon objective les faits.

http://news.abidjan.net/h/383875.html

Ne fermons pas les yeux sur les policiers tombés aux mains de quelques manifestants à Abobo, brûlés vifs, parce que pro gbagbo.

Ne détournons pas le regard de ces pauvres paysans de l’ouest, qui ont dû fuir leurs villages au lendemain des élections.

Personne n’est blanc comme neige dans cette histoire. Et les choses ne tourneraient pas toujours à la guerre s’il n’y avait toujours dans les coulisses, les gentils qui ne veulent que le bien du peuple.

Quand il y a deux « peuples » mécontents. L’incompréhension totale, le refus de voir les choses comme elles sont…

A l’ouest où vit une partie de ma famille, la geurre n’a jamais cessé. la guerre est toujours là, omniprésente. Les forces internationales sont là aussi, pour recueillir les populations, ceux qui ont réussi à échapper aux atrocités de leurs bourreaux.

Je me souviens que à quarante kilomètres de la résidence de mon père, il y a avait un campement de soldats, présents pour éviter le bain de sang.

Sous leur nez, des femmes et leurs enfants ont péri dans des puits. Certains ont eu pour dernière démeure des rivières. Des hommes et des femmes ont été exécutés.  Personne n’est venu à leur secours, c’étaient les ordres sans doutes.

Protéger la population quand vous êtes témoins de fait, si quelqu’un hurle au secours au loin, cela ne vous regarde pas.

Quel tribunal a puni ces crimes et ces exactions?

Quelle force est venue s’interposer?

Les coupables ont ils été inquiétés?

Non. Alors comprenez que même si je ne suis pas une pro gbagbo, personne ne viendra changer ce que je pense de ces arbitrages intéressés.

Tous se défendent, tous se servent du peuple, personne n’est là pour protéger le peuple. Ils ne mettraient pas l’huile sur le feu si cela était leurs intentions. Parler au nom du peuple quand deux peuples élèvent leur voix? Une abberration.

Ils périront tous sans doute, forts de leurs convictions respectives. Et si des mains ‘amies’ sont là pour servir les desseins d’une main plutôt que l’autre, qu’y pouvons nous?