Sophie Langlois parle des massacres à l’ouest de la Côte d’Ivoire

A tous ces journalistes qui ont une éthique et une conscience, à tous ceux qui ne reprennent pas en coeur ce que l’on leur dicte.

Votre métier c’est: investigation, récolte de faits vérifiés, rédaction dans le strict respect de votre éthique et de l’information.

Votre rôle c’est de faire la lumière sur la véracité des faits contemporains et historiques, mais je ne vous en veux pas, nous savons tous aussi que la guerre psychologique  prévaut en situation de crise et que beaucoup parmi vous sont tenus par les politiques.

Je sais aussi et j’ose espérer qu’il en reste encore, qui ont réussi à préserver leur intégrité et qui finiront par dire la vérité, les vérités.

Car depuis 2002, sur les grandes chaînes, il est question d’un seul individu, machiavélique, despote, assassin, et avec lui, toute une région.  Il est question de confronter deux réligions, et ils ont fini par gagner.

Des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants massacrées à l’ouest? Passé sous silence. Les journalistes n’avaient plus de plume pour écrire, ni de caméra pour filmer. Et même lorsque quelqu’un d’autre d’autre l’a fait à leur place, ils n’ont pas daigné le montrer, montrer la terrible vérité au grand public.

Visionnez cette vidéo.

http://video-express.ricmedia.org/play/?p=522

Faites comme Sophie Langlois, parlez de ce que vous savez, allez sur le terrain, ne vous contentez pas de copier ce que d’autres ont reçu. Ne passez pas votre temps à relayer une information formatée et traitée par d’autres.

Oui parce les politiques devaient justifier leur actes.

Justifier le bombardement des cités universitaires à COcody, à Port Bouet, à la Riviera.

La commando invisible sévit  dans la capitale? Pourquoi s’en faire, c’est normal puisque le président sortant refuse de céder le pouvoir.

Les ébriés se font massacrer dans leurs villages. Pourquoi s’en faire? C’est normal puisque le président sortant ne veut pas céder le pouvoir.

Les civils essayant de fuir les zones de combats se font intercepter et massacrer sur les routes. C’est normal puisque l’ancien président refuse de céder le pouvoir.

Je sais qu’en temps de guerre, la logique n’intervient plus. Mais  ne nous parlez pas de human rights, de Onu, de Tribunal pénal international lorsque des populations se font massacrer dans une région avec des bases militaires à vol d’oiseau.

Ils ne veulent voir que ce qu’ils ont envie de voir.

La question que je me pose c’est, puisqu’ils s’inquiétent tellement du bonheur des ivoiriens, que feront ils pour faire oublier que au pouvoir, face à eux, demain les heureux ivoiriens rescapés verront des gens qui ont massacré leur frères, leurs mères, leurs enfants, leurs familles?

Ou alors est-ce une côte d’ivoire avec un seul groupe ethnique qu’ils ont envie de créer?

Ou bien chercheront- ils demain à lutter pour un autre, si celui-là pour qui ils ont été si permissifs ne leur convenait plus?

Si j’étais journaliste, voilà les questions que j’oserais poser aux dirigeants de ce monde.

David contre Goliath

Chez nous il y a David, le plus faible qui dans la réalité est traité de méchant, puis de l’autre, Goliath, le plus fort, supposé être le plus gentil.

Ce n’est pas exactement ainsi dans la bible. Mais c’est ainsi chez nous.

On a crié à la dictature, à l’oppression, à l’échec. Rien n’y a fait. David, le supposé méchant avait ses compagnons de lutte. Goliath le supposé gentil et le plus fort avait les siens. Il est devenu plus fort. Triplement fort, définitivement fort.

Lorsque Goliath reçoit une pierre de David, ses amis crient « à l’assassin, à l’assassin »

Quand c’est David qui reçoit un pavé, c’est un silience de mort.

C’est le bras de fer en côte d’ivoire aujourd’hui.

Mes revenus y passeront, je le sais. C’est déjà arrivé en 2002. Ma région a été pillée, des être humains égorgés, amputés, brulés, le cacao volé, les paysans dépossédés de leurs biens. L’or et le diamant exploité. Mais personne n’a rien vu.

En 2011 ça recommence. Les malades peuvent mourir. Goliath doit régner.  Le peuple qui aura survécu à la famine pourra bénéficier de sa générosité.

Les banques sont fermées, ceux qui n’ont pas de réserve de vivres peuvent dire merci aux à Goliath le plus fort et le plus gentil. S’ils n’ont pas un bol de riz, ils pourront toujours se rassasier d’une balle perdue ou de celle des amis de Goliath.

Il est fort mais faible, le pauvre, alors il faut lui donner un coup de main.

Lorsque des chars roulent sur des voitures pour se frayer un passage au milieu d’une population exaspérée, aucune télé n’en parle. Ce n’est rien, c’est David et ses amis les victimes. Pourquoi faire la lumière sur ce qui peut arriver à un David et ses amis? Il est méchant! Il mérite ce qui lui arrivent, n’est ce pas?

Vous avez le droit de faire ce que vous faites. Il faut le mater le David!

http://news.abidjan.net/v/6139.html

Est ce inhumain?

Demandez à Goliath et ses amis.

Tout ce que le monde peut voir, c’est des femmes barbouillées d’argile blanche qui font un sitting devant un siège. Trop dangereux, à ce qu’il paraît. Elles risqueraient de polluer la vue à Goliath et ses amis.

A l’heure où j’écrie ceci, j’ai déjà appelé 10 fois depuis ce matin.

Plus de transfert officilel d’argent. Nous avons trouvé un circuit pour donner une chance de courte survie à ma mère et mes nièces.

Le risque, que j’hésite à prendre, c’est de l’envoyer le chercher dans une zone de combat. Elle m’a dit:

« Dieu est avec moi, tatie, et si je dois y rester, ce sera sa volonté »

Hier déjà elle a du se frayer un passage au milieu d’échanges de tirs, pour aller récupérer son jeune frère de 11 ans, pensionnaire à quelques lilomètres de là. Nous pensons judicieux qu’ils restent groupés.

A l’heure ou je parle, deux de mes frères, habitants de Abobo n’ont pas donné de nouvelles.

Mais ça c’est le dernier souci de Goliath et ses amis. Pour libérer le peuple de David, il faut les affamer, ils faut réécrire la vérité.

Mais moi aussi je suis David. Je vois ce qui est visible et je le dis à ma façon.

David a beau être faible et le supposé méchant homme, si ses amis et lui méritent des sanctions et des punitions, Goliath n’en démeure pas moins le plus gentil et l’ange qu’on veut nous amener à suivre.

Pardonnez moi pour les images choquantes que je vous impose mais dans la douleur et l’impuissance face à une injustice international, je mes sers de mots. Je n’ai pas besoin de sympathie, je ne vous en voudrai pas d’en témoigner. Le plus important, ce que je désire le plus, c’est de faire comprendre la situation. Ils n’y a pas qu’un seul méchant, il n’y a pas de vrais juges impartiaux, ils y a des gens cupides, intéressés, toujours prompts à venir tester leur puissance partout où ils le peuvent.

Tout le monde ne l’a malheureusement pas compris.

La vie continue. Nous attendons que ma nièce revienne de sonpérilleux périple  (aller récupérer l’argent qui lui a été transféré ce matin), nous attendons de la voir revenir saine et sauve, avant d’en faire un autre demain. En attendant, tout le monde est à l’affut de nouvelles.

Pourquoi je n’avais pas envie de fêter noël?

Noël est derrière nous.

J’ai passé le réveillon avec mes amis et mes deux soeurs. Cette année je n’avais pas le coeur à prendre la route pour la normandie. Depuis deux mois, ce dilemne me donnait la migraine.

Je n’avais pas envie de rire pendant les diners au cours desquels quelqu’un aurait le « chic » de s’approprier le conflit qui divise mon pays. De rire à des blagues pour lesquelles mon esprit serait moins ouvert que d’habitude.

Comment expliquer aux enfants que je n’avais pas le coeur à ça?

Les filles ont dû lire dans mes pensées. Elles ont émis le voeux de fêter noël chez leur cousine à Rennes. Avec mon fils et son père, nous avons réçu à la maison mes deux soeurs, leurs compagnons, et mes amis.

L’apéritif était presque explosif. Le mari de mon amie a oublié les consignes. Il s’inquiétait pour ce qui se passait au pays, pour mes parents. Partis de bonnes intentions, ça a failli se terminer en camps retranchés.

Evidemment il croyait connaître la situation. On en parle à la télé. Il ne comprenait pas que je ne sois pas d’accord avec ce qui se dit à la télé. Mon mari non plus. Alors j’ai entrepris de lui rappeler les faits de 2004 et toutes les irrégularités qui sont tues par la presse et les juges;

Au lieu de lever nos verres, je me suis livrée pendant dix minutes à un récapitulatif des faits vus par nous. Mes soeurs sont montées au créneau. Finalement, j’ai remis la fin pour un « entretien privé » illustré par des images qui parlent.

Bref, le réveillon n’était pas un vrai réveillon. Nous avons fini par rire, danser, mais était-ce vraiment de la joie? Je ne saurais vous le dire.

Et pour couronner le tout, il a fallu que je subisse les remarques cinglantes de ma soeur aînée. Ce soir là elle s’est prise pour Karl Who. Elle m’a déclaré de façon catégorique et « agressive » que j’étais grosse. Je pèse 67 kilos pour un mètre soixante quatorze. C’est vrai que cela fait sept kilos en trop, que je promets de perdre depuis 2008.

Je me suis retenue de lui rappeller qu’elle pèse plus lourd que moi et qu’elle devrait plutôt s’inquiéter de son surpoids. Mais c’est ma soeur, je la connais assez bien pour savoir qu’elle est désespérée pour les kilos dont elle a du mal à se délester. Qu’elle a peur que je devienne comme elle. (Je suis son modèle, son idéal et sa poupée de toujours) Et si je deviens obèse, elle ne pourra plus satisfaire sa passion de shopping addict. Elle n’aurait plus l’occasion de m’habiller…

J’ai compris que sa façon maladroite de me mettre en garde est une inquiétude « maternaliste » et réflète son échec personnel pour le régime qu’elle suit depuis.

Voilà, noël est fini. J’ai parlé à mes parents. Pour l’instant ils sont sains et saufs. Ma mère est convaincue que si elle pouvait fuir au village, ses chances de survie seraient plus importantes. Je lui ai expliqué que déjà à l’ouest, les populations fuiait les attaques de rebelles et certains sont même empêchés de passer la frontière pour se réfugier dans les camps  HCR au Libéria.

Crever ici ou ailleur, où est la différence?

Joyeux noël à Tous.

Pays en guerre, vive la célébrité!!!

Je m’y attendais un peu. Comme toujours. Mon époux a raison sur ce point lorsqu’il me dit souvent:

« Ne t’inquiète pas chérie, s’il y avait du « mouvement » (entendre la guerre) dans ton pays, ça se saurait très vite. »

Il a raison, la Côte d’ivoire est à la une. Des blindés et des corps qui jonchent le sol, le sang qui coule, deux camps, des ennemis, des alliés, des observateurs impartiaux ou des faux arbitres, tous les figurants sont là.

C’est la guerre, ça fait des titres accrocheurs, ça paie et c’est l’essentiel.

Des hommes d’affaires importants, des femmes chefs d’entreprises, des millionnaires, des ivoiriens surdiplomés émigrés ailleurs, ça ne fait pas de l’audimat, nous sommes assis là à nous gaver du succès des autres. Je suis la premère en tête de liste. Et je me demande toujours pourquoi ces grands reportages mettant en lumière des réussites fulgurantes ailleurs ne se font pas là bas.

Ils ne savent pas faire que la guerre. Ils savent travailler. ils savent gagner leur vie. Ils savent faire fructifier les ressources qu’ils ont.

Ceux qui font la guerre, et leurs alliés, ne réprésentent pas le peuple. Ceux qui font la guerre sont protégés par des alliés, par des soldats, tous fils de quelqu’un qui ne fait pas de politique. Ceux qui font la guerre sont des lâches. Ils lancent des ultimatums, puis restent cachés derrières leurs remparts et se moquent de ceux qui tombent.

S’ils sont si courageux, si vaillants, si puissants qu’ils le prétendent, pourquoi ne s’opposent ils pas ouvertement? Un face à face sans témoins ni porteurs, sans boucliers et qu’ils en finissent sans mêler la vie de gens innocents.

Images de Abidjan.net

La Côte d’ivoire est à la une. Normal. La guerre a éclaté hier. Voilà qui devient intéressant, très intéressant.

Pouquoi faut il toujours qu’il y ait des gens prêts à se frotter les mains avec les conflits des autres. Des journaux pas si neutres, je n’en parle pas. La vérité est souvent présentée selon l’angle dans lequel l’on se place. C’est vrai.

Je ne peux être impartiale moi même, si les ‘anges » d’aujourd’hui sont les bourreaux impunis d’hier. Je me souviens des miens qui ne sont pas revenus de l’exode, je me souviens de ceux qui ont perdu un bras, une jambe, je me souviens de ceux qui se sont noyés en voulant échapper à leurs bourreaux sanguinaires par le fleuve Cavally.

Alors, j’avoue que je ne peux être impartiale même si je le souhaite de toutes mes forces. Je ne suis partisane de personne. Mais je sais qui tenait l’arme qui a assassiné mes oncles, mes tantes, mes amis…

Je ne suis pas pour la guerre, je n’ai pas le pouvoir jusque-là innefficace des arbitres du monde. Je suis une citoyenne, écoeurée de toutes ces magouilles et ces tractations pas souvent  inintéressées qui font basculer l’avenir d’un peuple.

Continuer votre travail chers journalistes. Mais demain, lorsqu’ils arrêteront de s’entretuer, allez à la rencontre de ceux qui ne font pas de la guerre leur image de marque? Montrez nous ce qu’il y a de bien dans ce pays. Parlez nous de réussite. De bonheur.

Montrez nous l’actualité de ceux qui font la fierté du pays. Parce que ceux là restent dans l’ombre. Personne n’en parle. Ils feraient une UNE avec un impact assez porteur.