Retour à la maison!

Un adage dit: « Le séjour d’un tronc d’arbre dans l’eau ne le transformera jamais en caïman. »

Africaine de naissance, française d’adoption,  je n’ai pas eu besoin de m’intégrer; je l’étais avant même de venir ici. Cependant, je reste africaine dans mon coeur. C’est pour cela que je ne tourne pas le dos à mes racines, à mes traditions.

Si vous avez suivi les événements qui nous ont frappés depuis le vingt huit novembre 2010, vous savez comment une centenaire a défié la mort.

Nul n’est éternel! C’est vrai, mais si les bombardements ne les avaient pas contraints à se priver, à ne se contenter que d’une cuillère de riz par jour. A vivre le calvaire pendant trois mois (le temps qu’a duré le conflit), elle serait peut être encore quelques mois, voire un an avec nous. Elle serait partie paisiblement retrouver les siens.

Hélàs, l’homme propose et Dieu dispose.

Le week end dernier, nous avons tenu à lui rendre un dernier hommage, de façon traditionnelle et moderne.

Chez nous, on ne pleure pas une centenaire, on l’accompagne à sa dernière demeure dans la joie et l’allégresse. C’est ce que nous avons fait avec le noyau familial ici, et quelques amis qui sont venus nous soutenir. C’est le moins que nous pouvons faire pour adoucir sa route.

Un bref compte rendu de la situation pour dire combien cette réunion nous a tous replongés dans nos racines, combien cet instant nous a séché de larmes: La tante Tchéhigninon vivait enfin tranquille, depuis la crise de 2002 avec son fils à la capitale.  Fin 2010, un nuage se dessine à nouveau à l’horizon. Une pluie de bombe s’abat sur la ville. Des gens bien intentionnés (convaincus d’oeuvrer pour le bien de la population, créent des blocus: banques fermées, transferts d’argent supprimés, terreurs à l’ordre du jour. Bref. Tchéhigninon n’a pas survécu à celle là. Villages brûlés à l’ouest. Dans le sien, il ne reste plus de trois maisons, dont la sienne réduite de moitié. Des méssagers ont été envoyés au Libéria. Son frère de 70 ans, et quelques cousins sont revenus, bravant les risques, pour désherber ce qui reste du village avant l’arrivée de sa dépouille. Trente personnes, les plus courageux, l’accompagnent jusque chez elle. Ils dormiront, c’est sûr, à la belle étoile.

Le week end du 11 était à la fête. Nous avons invité un musicien de la région, qui heureusement pour nous, chante aussi. Accompagné de deux de ses collègues, ils ont assuré l’animation jusqu’à l’aube.

Mais avant de partager avec vous quelques minis vidéos, je vous invite à écouter John Denver et à visionner cette petite vidéo réalisée à un festival de Country l’année dernière?

Le temps est au rire et à la joie… alors, ne vous privez pas.

Take me home

 Little country dancer (take me home)

Veillée comme chez nous

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http://www.wat.tv/video/veillee-funebre-3tvsv_3tvql_.html

Le match des cultures: le travail

Avant l’accouchement

Pour ceux qui ne savent pas à quoi rime le match des cultures, laissez moi vous brieffer:

Le match des cultures c’est une de mes rubriques préférées qui opposent avec légèreté les différences ou les similitudes de ma double culture.

Ici on dresse un tableau comparatif du mode de vie dans les pays du nord et du sud.

Bref, nous en étions à la grossesse.

Je vous disais donc que la grossesse pouvait parfois devenir une source de stress et de tension dans certaines familles au sud.

Une femme qui désire accoucher dans le calme et éviter la « bêtise » de certains esprits tordus, a plutôt intérêt à activer le travail. Comme si cela pouvait se commander.

Au nord tout est possible. Quelle ne fût pas ma surprise lorsque j’entendais les gens demander:

« C’est pour quand l’accouchement? »

Ce à quoi, certaines futures mamans répondaient:

« Pour les 16 juin »

Ici, on laisse une alternative au bébé, s’il tarde à venir, on provoque l’accouchement.

Au sud ce n’est pas le cas.

L’accompagnement à l’accouchement se fait en deux étapes.

La première moitié du travail se fait à domicile, sous la responsabilité des plus âgées , aux méthodes traditionnelles.

Nous avons attendu plusieurs bébés dans ma famille et je peux vous dire que le travail est presque l’affaire des aînées.

On en oublie même la future maman. Sa grossesse ne lui appartient plus. Voilà comment ça se passe:

Le sport. le sport idéal pour une femme en travail, c’est la marche. On vous fait marcher, pour aider le bébé à descendre. On vous masse les hanches pour vous soulager du poids du bébé. Chose horrible que je ne souhaite à aucune femme, vous avez droit à un breuvage fait des feuilles de courges mixées. A ce qu’il paraît, c’est radical pour activer la descente du bébé.

Tout un cérémonial. Enfant, je n’aurais râté aucun de ces moments pour rien au monde.

Tout est apparement simple au Nord. Le travail se fait sous monitoring, dans une salle réservée à cet effet.

Tout est mathematique et probabilité. Si le bébé a été conçu à la mi novembre, fait les calculs et on l’attend pour début août. S’il prend son temps, on déclenche la grossesse. La femme en travail est choyée, brumisateur, le futur papa près d’elle, qui fait la respiration du chien (ils ont suivi les cours de préparation à l’accouchement ensemble)

Au Nord la femme à l’option péridurale. Ce qui n’est pas le cas au sud. La seule fois où la médecine intervient, c’est pour les complications. Et c’est la césarienne. L’accouchement se fait sans artifices au sud. Tandis que au nord, c’est médicalisé à 60 pour cent.

Ce que j’aime dans le folklore du sud, c’est que la femme est entourée dans ces moments de douleur et de bonheur.

Elle est prise en main par celles qui ont l’expérience.

Même si toutes les idées ne sont pas bonnes à prendre. L’important c’est de ne pas être seule. Les « mâtronnes » savent quand c’est le moment, elle décident alors de conduire la femme à la maternité. En général le bébé arrive dans les minutes qui suivent.

Le risque c’est parfois d’habiter loin de la maternité, d’avoir un bébé qui en a assez de toute cette « foule » autour de lui, qui n’a plus envie d’attendre, et qui amorçe sa descente dans le taxi.

J’ai connu le cas d’une future maman en train de pousser sur le branquard qui la conduisait à la salle d’accouchement. On l’avait trop fait attendre à la maison.

Eh oui! Au sud, nous n’avons pas la science exacte! Mais l’expérience humaine et la cohésion de la communauté.

Un bébé est avant tout celui de ses parents, mais aussi de la famille, de la communauté. En attendant le retour de bébé à la maison, on s’active. Je ne vous en dis pas plus.

A bientôt pour vous faire découvrir la façon dont on « materne » les jeunes mamans.

Funérailles en pays agni

Cela fait un moment, trop long à mon goût que je n’ai plus partagé les us et coutumes de chez moi. La mode n’est pas ma seule passion. J’ai beau m’intégrer dans ma nouvelle patrie, ce n’est pas une raison de tourner le dos à ma culture africaine.

J’ai assisté l’année dernière à une fête traditionnelle ivoirienne: des images pleines de couleurs, beaucoup de souvenirs remontés en surface… Le thème de la fête, c’était le rituel funéraire pour les personnes âgées.

La soirée a démarré comme toutes les fêtes, seulement ponctuée par ces rituels qui font la richesse de notre culture.

Tout d’abord nous avons eu droit à la danse qui permet de conjurer le mauvais sort. Selon les croyances de tous les peuples africains et des agni dont ils s’agit ici, il y a  toujours un dieu qui protège tous les hommes, et les femmes qui ont un certain pouvoir, en fait on pourrait dire qu’elles sont le pillier de la société. Puisque d’après la tradition, la seule apparition d’une femme pratiquement en tenue d’Adam suffit à apaiser ou à contrecarrer toute mauvaise volonté.

Ici elles se sont enduies d’argile blanche (kaolin), le blanc est signe de pureté; en temps normal, elle devraient toutes apparaitre avec pour seul vêtement leur leur « bikini » africain. Mais nous sommes en 2009, en France, alors je comprends que la timidité et la réserve l’aient emporté. Seulement quelques femmes ont osé ôter leur tissu pour apparaitre en tenue d’Eve (avec leur « bikini » bien entendu).

Ce rituel a été suivi par la cérémonie proprement dites: le Noolo. Le Noolo est un rituel funéraire exécuté pour les défunts d’un certain âge, les chefs, ou les rois.

A l’est de la Côte-d’Ivoire, au pays des Agni, les personnes âgées ont droit à des funérailles grandioses, rythmées par des manifestations musicales, dansées et chantées. Le noolo, expressions plutôt chantées, est exécuté en hommage au défunt. C’est un rituel qui vise à encourager les endeuillés, qui les aide à surmonter la douleur.

Au délà du Noolo, il y a aussi la danse kokoubè organisée lors de la célébration des funérailles, effectuée devant une cours de notables dans leurs tenues d’apparât où l’or occupe une place importante pour parfaire les pagnes tissés (Kita). Après avoir conjuré le sort, les femmes se sont changées pour revenir nous faire une demonstration de Kokoubè.

Le noolo peut être exécuté dès le premier jour des funérailles ou bien être organisé au cours d’une ou plusieurs veillées. En pays agni, on peut l’entendre indifféremment dans la journée ou dans la nuit. Ce soir là, nous avons eu droit à plusieurs exécutions de Noolo, devant une salle pleine à craquer et un parterre de « notables »

Précisons que le noolo des funérailles est réservé aux adultes. Et à ce qu’il paraît, réservé aux femmes déjà mères, chez certains groupes Akan.

En dehors de l’organisation de la fête qui manquait un peu de structure, je suis repartie de là impregnée de ma culture et d’images oubliées, résultat d’une intégration à ma culture d’accueil.

Mais il est dit chez nous que le séjour d’un tronc d’arbre dans l’eau ne le transformera jamais en crocodile….

She is a Catherinette

Une catherinette au musée des arts décoratifs!

Vingt cinq novembre. Une très forte envie de voir l’exposition consacrée à Madeleine Vionnet. Nous nous replongeons dans les années 20 et trente. Mais inlassablement, quelques apparitions aux couleurs vertes me rappelaient que nous étions le 25 novembre, jour de la Sainte Catherine.

Les photos sont interdites au musée. Mais l’envie d’immortaliser ne serait-ce qu’une de ces têtes chapeautées me taraudait. J’ai armé mon petit Kodak, prête à le faire crépiter aussi vite qu’un éclair.

Le temps de m’approcher de Christelle, d’obtenir son accord et clac, clac, deux poses rapides, avant de me faire intercepter par un gardien.

Christelle était au musée avec quelques autres catherinettes et même un Katharos. Eh oui, il n’y a pas que les catherine. Les coeurs à prendre sont des deux sexes.  Les jeunes gens sont là, protecteurs des catherinettes mais n’en démeurent pas moins des coeurs à prendre.

Le 25 novembre, on célèbre les Catherine mais aussi les Catherinette, une tradition du XVIème siècle.

La catherinette est une jeune femme qui à 25 ans, n’est toujours pas mariée. Katharos, le prénom qui remonte de la grèce antique, est symbole de pureté. Ce jour là, les Catherinettes et les Katharos arborent un chapeau couleur verte et jaune.

La tradition est perpétrée aujourd’hui par les modistes. Et j’espère que cela ne s’arrêtera jamais!

Merci Kristal, d’avoir posé pour moi.

Mariage mixte en afrique

Costumes traditionnels

Les mariages mixtes ne concernent pas que l’union de ressortissants de pays étrangers. Les mariages mixtes sont aussi une affaire de régions d’un même pays.

Dans un pays comme mon pays de naissance(La Côte d’Ivoire), il y a beaucoup de métissage. Couples issus du nord et du sud, de l’ouest et de l’est, ou même parfois de l’ouest mais issus de sous groupes ethniques différents.

Il faut dire que en Côte d’Ivoire, nouss comptons une soixantaine d’ethnies et de nombreux sous groupes. Alors parfois, nous nous retrouvons soit avec des enfants et des parents polyglottes, ou avec moins de chances, des enfants un peu « perdus »: qui ne parlent que le français, langue de communication des deux parents.

Bref, le but n’est pas de parler du problème de langue, maiss de mariage mixte. Samedi, Frank et Patricia se mariaient. Frank est originaire du sud, Patricia de l’ouest. Souvent, dans ces cas là, il est de bon ton de finir la soirée par un petit rappel des coutumes ou encore une présentation des mariés en costume traditionnel.

Samedi soir, nous avons aidé les mariés à mettre leurs tenues traditionnelles. Patricia a été maquillée par quelqu’un de la famille: des ronds d’argile blanche fait avec un bouchon de bouteille sur les bras et le visage, un collier de corail pour la cheville, un au cou; Un morceau de tissu tissé de la région maintenu par une ceinture pour former une sorte de jupe, la petite chemise en dentelle blanche et l’autre morceau de tissu plié en quatre jeté sur l’épaule. Un balai pour la mariée et un pour l’accompagnatrice.

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Frank de son côté a été habillé par sa famille. Un turban pour la tête, une chemise en dentelle blanche et un kita, tissu patchwork , tissus de grande cérémonie chez les Akan, la chevalière et le grand collier de chef en or.

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Le tout en musique des régions respectives.

Patricia escortée par tous les membres de sa famille présents, suivie par Frank et la sienne.

J’en avais presque les larmes aux yeux!

Le match des cultures: la grossesse

A mon dernier match des cultures, nous en étions au mariage. Au Nord, j’emploie les termes de Nord et de de sud pour désigner l’Europe et plus particulièrement la France, puisque je suis française, et le Sud pour les pays en voie de développement et particulièrement la Côte d’Ivoire qui est ma patrie mère.

Bref. Après le mariage, souvent c’est la période des vaches maigres là bas. Puisque tout le monde est le bienvenu, puisqu’on ne compte pas et que chacun des deux camps est très généreux en idées mais moins en cadeau. Bon, ce n’est pas grave, l’important c’est que les familles soient réunies et que la fête soit réussie.

Quand vous pensez que c’est enfin terminé et que vous allez pouvoir profiter de votre intimité, la famille est toujours là, omniprésente, c’est L’Oeil de Moscou en fait. Désormais tous attendent la prochaine annonce, la suite logique d’une union heureuse.

Je dois avouer que pour une fois le match est à égalité entre le Nord et le Sud.

Au Nord, vous avez un petit moment de répis. Le voyage de noce est l’entract qui vous permet de vous vider la tête. Un moment d’intimité très apprécier par les jeunes couples. Vous partez en France ou à l’étranger (pour nous c’était la Côte d’Azur). Une semaine de bonheur et de rébondissements. Nous n’avions pas loué et nous nous arrêtions au gré de nos envies, dans les villes qui nous attiraient. Personne pour nous épier pendant ce temps là. Au nord, vous êtes « lâchés » une fois le mariage terminé. L’espionnage est plus subtile. De petites phrases innocentes glissées dans une conversation lors des diners de famille. On parle bébé à toutes les occasions. Et si lallusion n’est pas saisie, on devient direct, du genre

« Vous compter avoir des enfants? », « combien? »

Ma chance est que mon homme étaient un John Lennon personnifié. Cool. y a pas le feu. « ça viendra quand ça viendra »

Dans toute cette affaire, il n’y avait que moi qui m’agitais sans en donner l’impression. Sans doute ma moitié de culture, la vraie, la source, l’autre étant bien assimilée mais importée.

Au sud, cette partie du match peut souvent s’avérer très rude. Le Bébé. Disons les enfants car souvent, le désir de famille nombreuse est très important. Une grossesse est l’événément qui vient solder un mariage heureux. Mais alors au Sud, il faut faire vite. On peut dire que c’est même parmi les choses pour lesquelles le retard est moins toléré.

Votre belle mère, vos belles soeurs, commencent par s’enquérir de votre état. On devient psychologue, médecin, tout ce que vous pouvez imaginer. Vos nausées, dûes à des problèmes ordinaires d’estomac passent pour des nausées de femmes enceintes. Vos migraines sont interprétées par les matronnes de la famille.

En gros, vous êtes dans l’orbite de « l’Oeil de Moscou ». Et je vous conseille de ne pas trop tarder à mettre en route le petit Souagnon. Souagnon c’est un nom choisi au hasard. Un bébé est souvent la clé d’un mariage durable. Gare à vous si la nature n’est pas en votre faveur. Belle famille s’empressera de trouver une remplaçante plus apte à assurer une descendance à leur fils.

Un mariage au sud, c’est l’affaire de tous. Parfois même les familles poussent le vice jusqu’à refaire l’arbre généalogique. En Exemple ma demie soeur a failli ne pas se faire épouser parce qu’elle était fille unique. Mauvais présage. Si elle est fille unique de sa mère, elle pourrait ne donner qu’un seul enfant à son mari ou ne pas en avoir du tout!!!

Heureusement ils ont été plus forts que la famille. Aujourd’hui ils sont heureux parents de quatres fils.

Au nord la belle famille peut s’imiscer dans votre vie avec subtilité sans trop réussir à briser votre ménage. Mon belle oncle, qui n’aimait pas les noirs, est parti sans plus jamais adresser la parole à son neveu, mon homme. L’ignorance n’épargne personne. Comme je dis, c’est lui qui a souffert, pas moi, et il est parti avec sa souffrance et sa bêtise. Car l’amour a été plus fort dans ce match.

Dans les deux cas, lorsque l’annonce du futur bébé est confirmée, c’est la joie pour tous. Le match est nul. Pour le reste, il faut laisser la grossesse se développer dans le calme. Le match des petites anecdotes est à venir car, un bébé à venir représente beaucoup dans les deux cultures.

A suivre.

 


Danseuses au couteau et société secrète à l’ouest de la Côte d’Ivoire

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Ce soir j’avais envie de voyager, de retourner aux sources. Je disais il y a peu, dans un de mes posts que « le séjour d’un tronc d’arbre dans l’eau ne le transformera jamais en caïman »

Tronc d’arbre j’étais, tronc d’arbre je resterai, même imprégnée pendant de nombreuses années passées en dehors de mon milieu naturel, à la rencontre de cultures nouvelles. S’adapter, s’intégrer sans  pour autant renier ses racines, sans perdre son âme.

Depuis quelques jours je collecte des informations pour ma petite cousine de Normandie, qui a choisi de faire un exposé sur la Côte d’IVoire. Elle a 9 ans. Tout ce travail de recherche a fait remonter des souvenirs. Les souvenirs d’enfance, des souvenirs de confidences recueillies auprès de ma cousine K; vous avez déjà fait sa connaissance. Bref, ce soir, je vous livre un bout de ma culture avant de revenir à Scarlett O’Hara. (Oeuvre de E kahio, photo Hortense Kanhan)

Ce portrait représente ma tante qui était danseuse traditionnelle. Le corail était beaucoup utilisé dans le temps pour jouer, pour décorer les costumes de danseurs. Pour le maquillage on utilise du Kaolin (de l’argile blanche). les figures géométriques que vous voyez là sont fait à l’ongle, au curedent et au peigne (fin).

Les anciens ont toujours dit qu’une danseuse doit dégager de la lumière, raison pour laquelle l’argile blanche est primée.

Si j’écris cet article ce soir ce n’ai pas pour parler uniquement de fête et de costume traditionnel mais pour vous parler des sociétés secrètes, fondements de nos communautés d’antan; Aujourd’hui il en existe peu mais il en existe encore.

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Un connaisseur pourrait croire que ces deux portraits représentent des danseuses au couteau, ou des danseuses au serpent; on peut leur attribuer plusieurs titres différents.  Elles sont plus connues pour leurs prouesses périlleuses lors des fêtes de village. (Oeuvre de E kahio artistre peintre, photo Hortense Kanhan)

Il y a très longtemps, faire partie d’une société secrète c’était presque pareil que entrer au séminaire. C’était une fierté pour chaque famille d’avoir une de leurs filles dans une confrérie; Les filles quittaient tout  pour recevoir une éducation réligieuse et initiatique, assez rigoureuse. Les maîtres partaient vivre loin du village, dans la forêt, avec leurs apprenties. Ils leur transmettaient une partie de leur savoir. Pour acquérir cette connaissance spirituelle et ésotérique, ses derniers doivent jurer de ne jamais se quereller durant toute leur vie. Ce n’est qu’après avoir prouvé  leur aptitude à maitriser leurs passions et juré de ne jamais faire un usage égoïste de leurs pouvoirs qu’ils peuvent disposer de ceux-ci.

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Le secret est le fondement premier de ces confréries. Ne jamais dévoiler à un néophyte ce que vous avez expérimenté et que l’on vous a transmis. Ma cousine K avait violé le code de sa confrérie en nous racontant ce qu’elle y a vécu. Quoique elle l’a dit elle même que nous ne saurions jamais tout. Pour avoir atteint un certain grade, elle avait le corps couvert de tatouage. Son corps ressemblait à une toile vivante. Des abdominaux en béton. D’après ce qu’elle nous a confié, la gymnastique commençait à l’aube, et pour les moins agiles, elle ne s’arrêtait presque jamais, il fallait travailler, encore et encore pour atteindre une parfaite maitrise des sauts périlleux. Le régime végétarien imposé n’autorisait que des oeufs durs. Eviter tout ce qui fermente. Avoir la peau à la fois ferme tout en restant souple. Sans souplesse elles sont incapables de faire ses contorsions et si elles ne sont pas fermes, elles risquent des blessures…

Les sauts se travaillaient à la liane dans la forêt. La précision était la seule garantie pour éviter des accidents graves. Elles ne connaissaient pas la peur. Vous allez comprendre pourquoi.

Le maître qui donne le spectacle avec les petites danseuses doit pouvoir compter sur leur agilité, la précision de leur gestes et leur résistante à toute épreuve. Elle ne connaissent ni peur, ni hésitation, fatigue.

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Le danseur et sa partenaire ne font qu’un. Ne pas se disperser en parole tout est dans le geste et le regard.

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Images des danseuses au couteau, sources La Côte d’Ivoire d’Aujourd’hui

Enfin, le clou du spectacle c’est ce que vous voyez là. Je vous ai expliqué pourquoi elles devaient avoir les abdominaux aussi fermes que ceux de Stallone et même plus. Pour la simple raison que lorsqu’elles sont  projétées par le maître et qu’elle sont reçues après plusieurs  sauts périlleux sur des poignards, il vaut mieux qu’elles aient des abdominaux en béton. Sinon c’est la catastrophe.

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J’ai beaucoup d’amiration et de respect pour ses petites filles. Personnes ne pourra jamais percer leur secret, le peu que je sais c’est d’avoir été témoin un jour à la pêche, de ma cousine K attrapant un serpent d’eau long de un mètre, vous me direz qu’il n’est pas dangereux, mais moi je ne pourrais pas, et qu’elle l’a anéanti en quelques secondes. Pardon à tous les amis des animaux, ce n’est pas moi c’est ma cousine K.

Je l’ai vu aussi être en transe une autre fois et avoir l’air de quelqu’un autre. D’après ce que m’a aussi confié, on leur apprend à connaitre les plante et à les utiliser pour les maux du corps. Certains sont anesthésiants, d’autres vomitifs….

Les membres des sociétés secrètes emportent beaucoup dans leur tombe. Le secret qu’ils n’ont pas encore trouvé, c’est celui d’enrayer les canons et de changer le coeur des Hommes pour faire le bien uniquement.

Violentée par sa mère pour s’être opposée à un mariage forcé.

 

Violentée pour un mariage forcé.

 

Une lycéenne de 18 ans d’origine algérienne aurait été victime de violences aggravées de la part de sa famille, à Toulon, parce qu’elle refusait un mariage forcé en Algérie et qu’elle entretenait une relation avec un non musulman. La jeune fille a eu le visage et l’abdomen lacérés avec un couteau. Sa mère et ses deux sœurs ont été mises en examen.

 

Etre mariée contre sa volonté avec le consentement des familles respectives; le calvaire auquel sont confrontées encore aujourd’hui de nombreuses jeunes femmes. Tenter d’y échapper peut avoir parfois des conséquences dramatiques telles que : rupture familiale avec tous les dangers que cela peut engendrer. Pression insoutenable de la part des familles…

 

Nous sommes tous amenés à cotoyer un jour où l’autre ces situations aussi délicates que dangereuses. Il y a 20 ans j’ai fais la connaissance d’une jeune fille harcelée par sa famille, déchirée entre l’amour pour son petit ami et l’affection pour sa famille. L’alternative qui s’offrait à elle était de convaincre son ami de se convertir afin d’être accepté par les siens. Pari difficile qui a échoué.  Ce dernier campait sur ses principes à lui et refusait d’entendre parler de conversion. Et je le comprends!

 

Fatiguée et sous la pression morale trop forte, elle a fini par céder. Aujourd’hui elle est mariée à quelqu’un de chez elle, venu de là bas. Quelqu’un comme elle.

Une autre lycéenne qui défilait pour moi à l’époque avait fuit le domicile familial pour échapper à un mariage forcé. J’avais proposé de l’accompagner dans un foyer ou dans une association. Elle a décliné mon offre par peur d’être réconduite dans sa famille ou d’être retrouvée par ces derniers. Elle a passé la plupart du temps à dormir ici et là, à errer comme un être sans attache, sans famille, sans lien, un « chien perdu sans collier ».

 

Nous avons connu le mariage forcé chez nous. Aujourd’hui la tradition a fait place à la « démocratisation » de l’union. Il a fallu que je vienne en France, un pays démocratique et de droit pour découvrir que ces pratiques perdurent encore sous couvert de la réligion et des coutumes.

 

Sous couvert de la réligion, des individus s’octroient le droit de vous priver de votre liberté d’expression. Sous couvert de coutumes ancestrales obsolètes, on vous fait subir des violences verbales, physiques.

 

Le cas de cette jeune fille violentée par sa propre mère vient illustrer ces violences faites aux femmes, tout ça sans doute dû à l’ignorance. En dehors de l’ignorance, je ne vois quelle autre cause pourrait justifiier ces agissements, ces actes de barbarie.

 

J’écris cette note en ayant une pensée pour cette jeune fille, qui a souffert dans sa chair et souffert moralement de savoir que sa mère, celle qui aurait dû la protéger, est celle qui devient son « bourreau ».

 

Une série de notes postées il y a un an sur mon premier blog en hommage à ma cousine K qui a trouvé une façon assez cavalière de se sortir du pétrin. Tout s’est bien terminé pour elle heureusement mais tout le monde n’a pas cette chance….